• Sur la situation en Catalogne

    Deux articles des militants occitans de NÒS (dont un déjà d'avant le verdict, sur la répression "préventive" et la tension qui montait déjà à ce moment-là) :

    http://nosinfo.org/index.php/rubricas/internacionalisme/item/858-le-peuple-catalan-est-dans-un-tournant



    Hier soir, les rues de Catalogne ont été pour la 4ème nuit consécutive le théâtre d'affrontements entre les manifestants, venus demander le droit à l'autodétermination et les forces de sécurité de l’État espagnol accompagnées des Mossos d'Esquadra. 

    Un haut niveau de combativité a été observée hier dans les rues de Barcelona où pendant plusieurs heures les manifestants ont tenu en respect les forces de l'ordre.

    Quelques heures plus tôt, les 6 colonnes des marches pour la liberté avaient fait leur entrée dans Barcelone, et plus d'1 million de personnes avaient répondu présent à l'appel à manifester des CDR, le tout dans un contexte de grève générale "pour les droits et les libertés". Plusieurs sources ont dénombré un total de 2,5 millions personnes présentes aux diverses manifestations tant en Catalogne que dans l'Etat espagnol (Madrid, Andalousie, Galice, Îles Baléares, Valence) ainsi qu'en Andorre.

    Les forces de l'ordre ont répondu de façon disproportionnée à la présence massive de manifestants pacifiques, utilisant la méthode du carroussel (utiliser les fourgons pour rentrer dans la foule et la disperser, au risque de renverser les personnes présentes sur leur passage), les LBD et les grenades lacrymogènes. Ils ont pu s'appuyer sur la présence de plusieurs groupes fascistes qui ont pu déambuler librement dans les rues catalanes, armés de barres de fer et de fumigènes, pour aller "chasser de l'indépendantiste".

    Des témoins racontent qu'à Girona ces groupes d'extrême droite espagnolistes n'ont pas hésité à attaquer des habitations exposant des symboles indépendantistes. Parallèlement, les axes principaux de circulation du pays étaient coupés par des manifestants, notamment l'autoroute reliant la France à l'Espagne. Après plus de 24 heures de présence à la Jonquera, les Catalans du Sud ont passé le relais à leurs homologues du Nord, qui occupent actuellement le péage du Boulou.

    Ce matin, le gouvernement catalan a demandé  une nouvelle fois au gouvernement espagnol d'ouvrir des négociations, au vu de la situation, alors que la Commission européenne et Amnesty International ont rappelé à Madrid la nécessité de trouver un juste milieu entre maintien de l'ordre et respect de la liberté de manifester.

    De nouveaux rassemblements sont à nouveau prévus dans tout le pays cet après-midi et demain. 

    Les Catalans en appellent à la solidarité internationale.

    https://nosinfo.org/index.php/rubricas/internacionalisme/item/851-le-point-sur-la-situation-en-catalonha

    Le lundi 23 septembre, la Catalogne se réveille en état de choc. Depuis 5 h du matin, 500 agents de la Guardia Civil multiplient les perquisitions chez plusieurs membres des CDR (Comités de défense de la République catalane), les accusant de préparer des attentats terroristes.

    Portes défoncées, familles entières, dont les enfants, couchés au sol sous la menace des armes des agents des forces de sécurité espagnoles, le tout la protection des Mossos d'Esquadra, la police autonome catalane. Toutes les scènes sont filmées et diffusées en boucle sur les chaînes de télé espagnoles. 9 personnes sont arrêtées et menées au cuartel de la Guardia Civil a Barcelone, d'où 7 des 9 détenues sont envoyées à l'Audiencia Nacional (le tribunal central) à Madrid, avec les charges de sédition, terrorisme et possession d'explosifs. Rappelons que le mouvement indépendantiste catalan se caractérise justement par l'action non violente, attitude qui délégitimise la répression violente de l'État, et qui explique la nécessité pour Madrid de générer un discours de terrorisme pour justifier le recours à des méthodes antidémocratiques. 

    Les avocats du groupe Alerta Solidària, spécialisés dans la défense des militants, principalement des mouvements sociaux, sont désignés par les familles des détenus pour défendre ces derniers. Cependant, 24 heures après les détentions, les avocats font savoir qu'ils n'ont toujours aucun contact avec leurs clients. 2 des 7 détenus, à forces de pressions, se voient désigner, contre la volonté de leurs proches, 2 avocats commis d'office. Ces 2 militants auraient fini par avouer, après des heures d'interrogatoire, préparer des actes terroristes, sans que personne ne sache comment auraient été obtenus ces "aveux". 

    Jeudi 26 septembre, à la demande du procureur, les 7 détenus sont placés en prison préventive sans condition pour terrorisme, alors que les charges pour sédition et pour possession d'explosifs sont abandonnées. 

    Ces détentions arbitraires interviennent comme une mise en garde de l’État dans un contexte d'agitation croissante en Catalogne avec la proclamation imminente du verdict dans le "procès" contre le référendum d'autodétermination du 1e octobre 2017. Désormais ce sont 16 prisonniers politiques catalans qui dorment dans les geôles espagnoles, auxquels il faut ajouter 9 exilés politiques, réfugiés en Écosse, en Belgique et en Suisse.

    Cette semaine pourrait être un moment cruciale dans le conflit qui oppose la Catalogne et l'Espagne. En effet, le verdict du procès contre le référendum d'autodétermination est attendu vraisemblablement pour le vendredi 11 octobre, veille de la fête de "l'hispanité", que les Catalans se sont toujours refusés à célébrer.

    Quelles sont les clés pour comprendre ce qui se joue ?

    1. Une monarchie post-franquiste - La transition démocratique de l’État espagnol n'a jamais eu lieu. La Constitution de 1978 est née d'un compromis entre l'armée, l’Église et les démocrates, ce qui explique par exemple que l'armée soit garante de l'unité territoriale de l'Espagne. Franco mort dans son lit et ayant lui-même désigné le roi Juan Carlos comme son successeur, la loi d'amnistie est venue parfaire le "nouveau" régime : une peinture de façade sur une double tradition dictatoriale et monarchique, sans aucune séparation des pouvoirs.

    2. Les élections générales du 10 novembre prochain - Le socialiste Pedro Sanchez n'ayant pas réussi à obtenir une majorité pour former un gouvernement, les Espagnols sont à nouveau appelés aux urnes dans un mois. Alors que la crise sociale, économique et climatique fait rage, c'est bien la Catalogne qui sera le seul thème de la campagne électorale, cette Catalogne coupable de tous les maux de l'Espagne, dans un affrontement sans limite entre le PSOE, Ciudadanos, le Partido Popular et Vox pour savoir lequel proposera la répression la plus virulente et la plus violente.

    3. Un 155 qui ne dit pas son nom - L'article 155 de la constitution espagnole permet de suspendre l'autonomie d'une communauté autonome dans le cas où celle-ci ne respecterait pas la dite constitution. Il fut déjà appliqué à l'automne 2017, après la soi-disant déclaration d'indépendance (non publiée au journal officiel) du 27 octobre. Cependant, l'attitude tant des chaînes de télévision catalanes comme celle des Mossos d'Esquadra et de la Généralité (gouvernement autonome catalan) laisse clairement penser que l'intervention centrale sur l'autonomie catalane se poursuit à couvert, de même que le demande du gouvernement provisoire de Madrid d'interdire tout débat au parlement de Barcelone sur la monarchie ou l'autodétermination.

    4. Sur le terrain : des provocations et une répression constante - Le principal problème  de l’État espagnol est qu'il a à faire à un mouvement farouchement non violent. Afin de pouvoir justifier une stratégie répressive violente, tant devant l'opinion publique que ses voisins européens, Madrid se doit donc de générer un récit d'un mouvement indépendantiste violent. C'est dans ce cadre qu'il faut situer les détentions des 7 membres des CDR le 23 septembre dernier. Les accuser de terrorisme permet de justifier l'application de la loi anti-terroriste, qui signifie une suspension des droits et libertés fondamentales et de la démocratie au nom de la raison d’État. Et établir un lien éventuel entre Carles Puigdemont, le président catalan exilé à Bruxelles, et les CDR, permettrait à l’État espagnol de publier un nouvel ordre européen de détention, basé non plus sur les accusations de sédition et rébellion, rejetées par la justice belge, mais sur une accusation de terrorisme. De plus, générer un tel discours permettrait également à Madrid d'illégaliser l'ensemble des partis politiques et associations indépendantistes. C'est également à cette seule fin d'engendrer une réaction violente que la Guardia Civil et l'armée ne cessent de provoquer la population par des déplacements incessants, s'affichant dans les espaces publiques, parfois en armes.

    Le verdict du procès politique contre le référendum s'annonce dans ce contexte comme un possible point de rupture, plusieurs mouvements ayant déjà averti de l'organisation d'actions (non violentes) dans le cas, probable, où la sentence serait condamnatoire.


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